L'analyse du film Mon oncle (1958), du réalisateur Jacques Tati, se portera essentiellement sur le rapport entre l'image et le son de la scène d'introduction. Je vous fait partager ce travail en espérant qu'il vous aidera à mieux comprendre ce film et à, par la même occasion, montrer à ceux qui ne sont pas en cinéma qu'une petite scène de film comme celle là peut avoir bien plus a raconter qu'on ne peut l'imaginer au départ. Cela dit en passant je diffuse cette analyse particulièrement car j'y ai eu une très bonne note, et le cours s'intitulait l'Espace sonore dans le cinéma.
Dans cette scène l'image se distingue premièrement par ses couleurs. Le premier "monde" se caractérise avec des couleurs vives tels que le manteau de la femme qui est vert mais aussi le jardin. Mais ces couleurs ne sont que des touches qui dynamisent le décors, alors que le reste est neutre avec des couleurs comme le noir, le gris et le blanc. Dans les second "monde" les couleurs sont très liées à la terre avec du marron, du gris, du kaki, le marron étant le plus présent. Et comme dans le premier milieu, il y a des petites touches de couleur plus ou moins vives tel que la robe bleue de la jeune fille. Mais bien que les couleurs de l'image montrent dès le début une différence entre les deux lieux, les plans sont presque souvent les mêmes.
En effet Tati utilise pour la plupart du temps des plans d'ensemble et fixes, ce qui met le spectateur dans une certaine immobilité. A l'intérieur du cadre les personnages bougent, vont et viennent, particulièrement dans les premier lieu où la caméra est bien fixe mais la femme donne une certaine dynamique en bougeant à l'intérieur du cadre, tandis que son mari bouge très peu, c'est donc elle qui crée du mouvement en apportant les affaires à son mari. Le mouvement de caméra apparaît lorsque nous suivons le voiture. Et dans le deuxième lieu, le mouvement se fait par M. Hulot, l'oncle, qui traverse l'espace de l'image, et l caméra le suit quand il monte chez (ce qui donne un aspect comique à la scène d'ailleurs). Tati privilégie ainsi les plans fixes et d'ensemble.
Dès le début de la scène, les sons donnent du rythme, ils créent un certain mouvement pour combler le manque de mouvement de la caméra. Les bruits, les effets sonores sont très présent dans le premier monde. En effet nous pouvons les distinguer et faire aisément une énumération: la tasse; les pas de la femme; sa veste (ou robe, c'est indéfinissable); la voiture; l'aspirateur; le briquet et la boîte à cigare que le mari ferme. Mais ces bruits sont mécaniques, sans vie, nous n'entendons qu'eux. Par exemple, nous n'entendons pas le chien, les personnages ne parlent pas, comme si les sons (ou effets sonores) dictaient l'espace et par conséquent l'image. De fait, dès que nous entendons un son off, il devient in , c'est à dire que nous ne voyons pas la source du son avant de l'avoir entendu. Pour donner un exemple : les pas de la femme, nous ne voyons la femme qu'après avoir entendu ses pas soit par un changement de plan, soit par son arrivée dans le champ. Donc dans ce premier espace le son semble diriger l'image et la rythmer.
Le deuxième espace lui est dirigé par les gens, la parole et il n'y a pratiquement pas (ou peu) de bruits. La parole et la voix y sont privilégiées ce qui donne un caractère plus humain à la scène. Mais cette parole ici remplace les bruits de la première partie, elle est alors traitée comme du bruit qui n'a pas de référent, donc de sens. Elle est moins claire et nette que les bruits qui eux étaient très clairs, distincts. C'est plus ce que je qualifierai de "brouhaha" général et plus réaliste que les autres sons. Ici la place faite au silence est mince voir nulle alors que dans la première partie le silence était pesant et faisait des sons encore plus perceptibles. De plus la parole n'est pas synchrone avec l'image ce qui crée un petit décalage entre le son et l'image. Par conséquent le son est révélateur des deux espaces, ainsi que la musique
Il y a deux musiques différentes pour les deux lieux. La première fait son apparition au départ de la voiture et contient environ trois thèmes. C'est une musique très rythmique qui définit bien la scène, le mécanisme de la vie de le famille et s'associe également aux sons, qui s'insèrent dans cette même musique, notamment avec la portière de la voiture qui se ferme et claque. Elle disparaît (la musique) quand la voiture se gare devant l'usine en une cadence très "pompeuse".
Cette musique est très différente de l'autre, qui contient deux thèmes et qui débute au départ de la charrette. C'est une musique plus douce et calme, faite à partir d'accordéon, de piano et d'un instrument à vent (il me semble, peut être une flûte) alors que l'autre musique était plus rythmée sur un ton de jazz avec des trompettes, du piano et peut être également de la contrebasse. La seconde diminue lorsqu'on voit l'oncle Hulot, et laisse la place au grognement du chien, et elle reprend dès que lui même repart pour aller pour aller chez lui, puis elle s'arrête pour le chant de l'oiseau et le grincement de la fenêtre (ce qui crée encore un effet comique) pour finalement reprendre quand Hulot s'en va de chez lui.
Tati réussit à tirer une critique, ou du moins à émettre et montrer la différence entre deux mondes qui s'opposent, d'une part grâce à l'image mais aussi grâce au son. Mais sa critique reste légère car elle réalisée par l'humour, notamment grâce aux différents sont "surréalistes" et exagérés de la première partie de cette scène d'introduction. Le côté plus humain de la seconde partie nous permet de distinguer le côté mécanique de la première, utilisant la voix des personnages (qui ne parlent pas dans le premier lieu). Monsieur Hulot s'engouffre ainsi , en même temps que le spectateur, dans le "brouhaha" du marché où règne la vie et la chaleur. Mais lui même ne parlera jamais dans cet extrait, malgré l'environnement.
La musique gai de la seconde partie nous laisse en joie et témoigne la détente, la vie et la gaîté du lieu, tandis que celle de la première témoigne de l'empressement et du mécanisme.
L'image nous permet également de distinguer les deux espaces: l'un est ordonné, propre et moderne, alors que l'autre est déstructuré. Mais plus ancien et libre de se laisser aller à ne rien faire (tel le balayeur qui s'arrête de travailler et se laisse distraire dès qu'il y a un passant).
Bien que Jacques Tati soit enclin à critiquer par la comparaison de deux espaces, le comique est toujours et déjà là. Notamment par la seconde musique qui entraîne le personnage de M. Hulot à se déplacer dans l'espace quand il rentre chez lui. Elle est légère et accompagne le personnage dans son déplacement lorsqu'il monte et descend les escaliers, cela a un effet comique. Mais la ménagère du premier monde est également comique à vouloir tout nettoyer (y compris l'arrière de la voiture et les jardinières), le bruit de son habit, un son de froissement dès qu'elle fait le moindre mouvement ça amplifie le comique de la scène. En effet on s'apercoit qu'elle bouge tout le temps et ne s'arrête jamais (il y a aussi le bruit de ses pas, irréel, qui par surcroit accompagne son déplacement rapide et participe au comique).
Les deux lieux sont comparables . Dans l'un ils ne sont que trois (les membres de la famille) et ils semblent cloîtrés chez eux, alors que dans l'autre ils sont toute une multitude et ils bougent dans un espace ouvert et public, la rue.
Ainsi Tati réussit à poser une critique sociale de façon comique en comparant deux espaces, deux mondes par l'image et le son. La relation entre eux est mince car le son amène l'image, même si il y a une a-synchronisation entre la voix, les dialogues et le mouvement des lèvres des personnages de la seconde partie de l'extrait. La musique est quand à elle importante car elle est le reflet de cette comparaison : mécanisme / humanisme dressée dans cette scène d'introduction du film Mon Oncle de Jacques Tati, 1958.
C'est pas ton analyse en entier ?
RépondreSupprimersi, mais en 3heures seulement il y surement des choses qui sont moins développées ^^
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